Ta boîte!

C’est vrai tout le temps, mais c’est encore pire en période de crise : c’est plus dur pour les pauvres. La société juge la valeur des gens en fonction de l’épaisseur de leur portefeuille. La vie a un prix.

Ça manque d’humanité.

On oublie souvent que la plupart des grandes choses ont été faites par des pauvres. Les pauvres, ils ont pas le choix de se réaliser pour survivre. Pas le choix de se battre. En plus, sont bien plus généreux que la moyenne. Dans la vie, c’est ceux qui en ont le moins qui partagent le plus avec ceux qui en ont encore moins.

Les riches, ils ont pas d’efforts à faire, tout leur est donné. Quand tu es riche, tu as pas besoin d’être quelqu’un, l’argent parle à ta place. C’est bien plus facile d’être un riche niaiseux qu’un pauvre niaiseux.

Pendant la crise, c’est bien clair que les riches s’en sortent mieux. On le voit, ce qui se passe. Les grandes entreprises se font donner des contrats par le gouvernement pour produire ce qu’il a de besoin, puis les PME se font dire de fermer. Les travailleurs se font subventionner leur salaire, puis les retraités qui ont de l’argent et des placements, genre les snowbirds, sont traités aux petits oignons par les banques et les gouvernements. Qu’est-ce qu’on fait avec les vieux qui sont pauvres ? Avec les cassés de la société qui n’ont pas une cenne ?

On leur donne des boîtes de nourriture.

Puis encore là, faut qu’ils prouvent qu’ils sont assez pauvres pour y avoir droit.

Parlant de boîte de nourriture, m’a vous en compter une.

Je connais quelqu’un qui en a reçu une. C’est une de mes voisines. Elle est pas en forme, elle est hypothéquée. Elle marche avec un déambulateur, elle fait de l’asthme, du diabète pis de la haute pression. Elle a un souffle au cœur pis un défibrillateur. Elle a une plaque de métal parce qu’elle s’est brisée une hanche en tombant l’année passée. En plus, elle est obèse ! Elle a bien une fille qui l’aide de temps en temps, mais elle travaille puis elle vit loin, elle est pas souvent là.

Je vais vous décrire ce qu’il y avait dans la boîte qu’elle a reçue : deux pots de sauce VH à spare ribs, un sachet d’assaisonnement à spare ribs, mais pas de spare ribs !! Un gros sac de chips all dressed, un chou rouge, deux cannes de choucroute pas de label dessus, deux boîtes de Kraft Dinner demi-portion avec des bibittes dedans, un sac de fèves vertes à moitié pourries, deux sacs de biscuits Breton épicés au boutte et pas mangeables, deux courgettes à moitié pourries, un gros pot de jus V8 rendu quasiment brun, un petit pot congelé de sauce à spaghetti, mais pas de spaghetti !

That’s it!

On lui a dit que cette boîte-là, c’était pour qu’elle toffe deux jours, le temps qu’elle reçoive un appel de quelqu’un pour l’aider avec sa grocery.

Se faire offrir une boîte de même, c’est insultant !

On dirait qu’on nous donne ce qu’ils n‘ont pas réussi à passer. Comment tu peux tenir avec pas de lait, pas de pain, pas de viande ? Même pas un œuf !

Je sais que pour eux autres, nous autres, on n’est pas important. On n’est pas des gens qui rapportent, on est vu comme des dépenses.

Ça me fâche !

On est peut-être vieux et pauvres, mais le monde oublie qu’on est les bâtisseurs d’hier. On n’est pas exigeant, on demande juste l’essentiel. Me semble qu’on aurait le droit à un peu de décence.

 

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On la vit pas pareil, la crise!

Le confinement, c’est bien plus facile dans un cottage de Saint-Lambert que dans un trois et demi pas de balcon grand comme un garde-robe.

Pendant que les riches vident les tablettes dans les Costco, nous autres on a de la misère à trouver un pot de lingettes dans les magasins à une piasse ou des Kleenex pour pleurer…

« Acheter local» ! Ils me font rire avec leur « acheter local » ! C’est une farce! Une farce pas drôle. On aimerait ça « acheter local », nous autres avec. Mais, faudrait qu’on aille les moyens. Ça coûte cher, le « local ». S’ils veulent, ils ont juste à nous donner de l’argent comme ils font avec les autres, on va le faire.

On est pauvres, on n’est pas niaiseux !

En ce moment, on se sent comme des laissés-pour-compte. On a l’impression que la société rit de nous autres. On nous demande de suivre la parade, de suivre le rythme, mais on est pogné pour rouler avec des vélos pas de tire sur un chemin plein de garnotte. Si jamais on arrive à se rendre au boutte de la route, on le sait bien qu’on va se faire dire par ceux qui décident qu’on n’arrive encore une fois trop tard.

Le manque d’aide qu’on a par rapport aux plus riches, ça veut dire quoi au juste ? C’est bien beau de dire qu’on est désolé pour les victimes, mais ils font quoi pour qu’il y en aille moins de morts chez les pauvres ? Veux veux pas, on finit par se poser des questions. On se dit: coudonc, ça fait-tu leur affaire que les vieux pauvres puis que les malades meurent ?

Ça fait-tu moins de monde à payer pour ?

Le seul droit qui nous reste, c’est-tu de mourir tout seul sans chialer ?

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